Petite revue des aspects moins glorieux ou plus sombres.
HITCHCOCK ET LES OSCARS le mépris d'Hollywood.
Si on se réfère à sa longue carrière, aux chefs d'œuvre qu'il a laissés à la postérité et à son immense succès public, il est difficile aujourd'hui d'imaginer qu'Alfred Hitchcock n'a jamais reçu la moindre récompense digne de ce nom.
Il n'a même, qu'à de très rares occasions, été nommé aux oscars dans la catégorie des meilleurs réalisateurs, reconnaissance ultime d'un metteur en scène aux Etats-Unis. Il faut dire que ses films ont toujours été considérés par ses pairs comme des œuvres mineures essentiellement commerciales. Avec notre regard d'aujourd'hui, il faut bien reconnaître que c'est totalement faux et il suffit de voir combien il est toujours un réalisateur étudié et imité pour s'en convaincre.
Hitchcock n'a jamais été reconnu par le microcosme hollywoodien en raison vraisemblablement de son grand succès dont il lui était fait rigueur et qui semblait incompatible avec un vrai talent de cinéaste. Sa mise sur la touche bien loin des flonflons de la grand'messe d'Hollywood n'a jamais ému personne dans la profession. Fort heureusement, sa perception en France était bien différente. Sous l'impulsion de la Nouvelle Vague, François Truffaut en tête, il était jugé à sa juste valeur et encensé le cas échéant (voir Coups de projecteur sur François Truffaut - histoire des entretiens).
Même s'il semblait prendre l'indifférence du milieu cinématographique américain avec un certain détachement, Hitchcock a sans doute regretté au fond de lui de ne pas avoir la reconnaissance qu'il était en droit d'attendre. Combien de réalisateurs bien moins chevronnés que lui ont été bien plus honorés ?
En tout et pour tout, en 50 ans de carrière dont 36 aux USA ponctués de 30 films, il n'a été en compétition que 5 fois pour l'Oscar du meilleur réalisateur et n'a bien entendu jamais été récompensé. Ses nominations étaient pour Rebecca (1940), Lifeboat (1944), La Maison du Dr Edwardes (1945), Fenêtre sur cour (1954) et Psychose (1960).
Si Rebecca a bien reçu un oscar, c'est celui du meilleur film et la statuette est donc revenue à David O. Selznick le producteur. Le meilleur réalisateur désigné cette année là a été John Ford pour Les Raisins de la colère.
D'autres de ses films ont bien sûr été nommés dans diverses catégories, mais de façon limitée et récompensant essentiellement des aspects techniques ou artistiques n'ayant pas la même importance que les catégories principales. On peut juste relever l'Oscar de la meilleure actrice décerné à Joan Fontaine pour son rôle dans Soupçons en 1941.
Maigre bilan qui nous paraît bien mal représenter l'impact qu'Hitchcock a eu sur le cinéma mondial et tout ce que les réalisateurs des générations suivantes lui doivent.
Sur le plan international, la reconnaissance dans les grands festivals n'a pas non plus été à la hauteur de son talent. On notera juste 3 participations en compétition au Festival de Cannes pour Les Enchaînés, La Loi du silence et la deuxième version de L'Homme qui en savait trop ainsi qu'une participation au Festival de Venise pour La Main au collet sans le moindre succès.
Il est paradoxal de voir qu'il doit sa plus grande récompense, un Golden Globe en 1958, à sa série télévisée Alfred Hitchcock présente… Pour un homme à qui le cinéma doit tant, c'est un tantinet mesquin !
Les quelques distinctions honorifiques qu'il a reçues à la fin de sa vie et qui avaient surtout le goût d'un hommage pré-funèbre ne sauraient racheter le sentiment d'injustice qui, sur ce point, caractérise la carrière de cet immense cinéaste.
LES ERREURS DANS LES FILMS D'HITCHCOCK personne n'est parfait.
Le tournage d'un film demande beaucoup de rigueur car énormément de paramètres peuvent influer sur son rendu à l'écran. Aucun long métrage n'est sans défaut, y compris ceux tournés de nos jours et tous comportent des erreurs en nombre plus ou moins grand.
Certaines sont assez grossières, d'autres demandent un peu plus d'attention car elles sont plus difficilement décelables. Les films d'Hitchcock n'échappent pas à la règle comme le prouve cette petite sélection des erreurs parmi les plus intéressantes. Certaines rendent mieux à l'écran que sur une simple photo et d'autres ne peuvent pas être montrées autrement qu'en mouvement.
J'ai classé ces exemples en 3 catégories :
1) les erreurs matérielles (un accessoire qui se trouve dans le champ, une lumière de projecteur qui se reflète…)
2) les invraisemblances (des situations irréelles compte tenu des circonstances ou impossibles dans la réalité…)
3) les erreurs de continuité (une position de l'acteur différente en fonction du plan, un décor qui varie…). Ce sont les plus fréquentes car beaucoup de situations demandent une grande attention pour que tous les plans soient parfaitement "raccords".
1) les erreurs matérielles
1 Meurtre (1930) : Que fait ce projecteur ou ce micro en plein dans le champ de la caméra lorsque Hitchcock fait son apparition (59e) ? Sans doute une erreur d'inattention.
2 Sueurs froides (1958) : juste après la chute de Madeleine/Judy du haut de la tour à la toute fin du film, la religieuse sonne le tocsin et alors que la caméra se recule rapidement, on peut apercevoir l'ombre du caméraman se projeter furtivement sur le mur. Malgré ce que peut laisser croire l'image, il ne s'agit pas de l'ombre de la religieuse.
Enfin, la majorité des erreurs viennent du fait que les projecteurs peuvent se refléter sur un élément du décor comme dans 3 Psychose (24e) ou encore -4 Pas de printemps pour Marnie (43e).
2) les invraisemblances
1 La Maison du Dr Edwardes (1945) : on voit très bien l'inscription "Library" sur la porte lorsque Constance Petersen entre dans la bibliothèque. Lorsqu'elle en sort (21e), elle n'y figure plus.
2 Les Enchaînés (1946) : quand Alicia et Devlin sont dans la voiture poursuivis par un motard (8e), l'image projetée dans le rétro n'est pas inversée.
3 Mais qui a tué Harry ? (1955) : lorsque le Capitaine Wiles tire le cadavre d'Harry (7e), celui-ci ne peut avoir les bras collés au corps, ils devraient partir en arrière.
4 Idem : lorsqu'il a fini d'enterrer Harry avec Sam (49e), qu'est donc devenue la terre en surplus ?
5 La Main au collet (1955) : lors de la soirée organisée pour démasquer "Le chat", l'action se situant en France, l'inscription Bertani's figurant sur la camionnette (87e) est impropre puisque cette contraction indiquant le possessif existe en anglais mais pas en français.
6 L'Homme qui en savait trop (1956) : lorsque Louis Bernard se fait poignarder, l'assassin lui plante le couteau au niveau de l'omoplate droite (28e). Quand il s'avance vers la place du marché, le couteau est planté au milieu du dos (voir aussi une erreur de continuité concernant cette scène).
7 Le Faux coupable (1956) : quand Balestrero est incarcéré, le gardien lui demande de retirer sa cravate avant d'entrer dans la cellule, ce qu'il fait (41e). Lorsqu'il sort de la cellule le lendemain, il a sa cravate autour du cou.
8 Sueurs froides (1958) : Scottie et Madeleine partent en voiture vers la mission (68e). Sur les plans pris de l'intérieur de la voiture, ils roulent à gauche, sur les plans aériens ils roulent à droite de la route.
9 La Mort aux trousses (1959) : lorsque dans la cafétéria Eve menace Roger avec son revolver (101e), le garçon en arrière plan se bouche les oreilles avant que le coups de feu ne soit tiré.
10 Psychose (1960) : Marion vient de se faire assassiner dans sa douche. Comme elle est morte, ses pupilles devraient être dilatées. De plus, sur le plan plus large, on voit battre son pouls au niveau du cou.
11 Les Oiseaux (1963) : dans toutes les scènes d'attaque des oiseaux, on ne voit pas leur ombre se projeter au sol malgré le soleil. Il s'agit en fait de plans incrustés au montage.
12 Le Rideau déchiré (1966) : lorsque Armstrong et Sarah fuient en bus (88e), l'image en arrière plan est projetée à l'envers, ce qui est particulièrement visible sur toutes les enseignes dont l'écriture est inversée.
13 Toujours dans Le Rideau déchiré : quand le bus se fait arrêter par les militaires (93e), on voit un de ceux-ci parler au chauffeur par la fenêtre avant mais elle ne peut pas s'ouvrir.
14 Frenzy (1972) : le gardien de l'hôpital est retrouvé endormi mais les somnifères qui ont été mis dans son café sont toujours visibles dans la tasse (105e). N'ayant pas fondu, ils n'auraient pas dû agir.
3) les erreurs de continuité
1 Les 39 marches (1935) : le professeur Jordan tient son revolver de la main gauche lorsqu'il parle à sa femme (43e), sur le plan de face, il le tient de la main droite.
2 Joies matrimoniales (1941) : Ann lance une carafe pleine d'eau qui se brise contre le mur et on voit très bien celle-ci couler (84e). Sur le plan suivant, il n'y a plus aucune trace.
3 La Corde (1948) : Cadell ouvre le coffre où se trouve le cadavre. Sur le plan durant lequel il soulève le couvercle, on ne voit aucune trace sur le pansement qu'il a fait avec son mouchoir suite au coup de revolver (72e). Dans la seconde suivante, on voit très bien que le pansement est rouge.
4 Le Crime était presque parfait (1954) : Tony décroche le cadre du mur pour le montrer à l'inspecteur (56e). On voit très bien ensuite qu'il n'est plus à sa place puisqu'il ne l'a pas raccroché. Il réapparait comme par magie peu après (59e).
5 Fenêtre sur cour (1954) : Lisa montre à Jeff ses affaires contenues dans une petite valise (67e) puis les bourre dans celle-ci sans les ranger. Lorsque Doyle arrive et regarde la valise (69e), on voit les chaussons parfaitement alignés sur le dessus.
6 La Main au collet (1955) : Robbie marche avec l'inspecteur des assurances au marché. Une femme en robe rose les croise (24e), Robbie se retourne et voit les policiers puis la femme en rose les croise une deuxième fois.
7 L'Homme qui en savait trop (1956) : Les MacKenna sont assis dans le bus. Les places devant eux sont occupées par une femme en blanc et une autre avec un voile rose (3e). Lorsque le fils se lève, les sièges sont vides puis à nouveau occupés juste après.
8 Toujours dans L'Homme qui en savait trop (1956), Louis Bernard vient de se faire poignarder. Quand il essaie de retirer le couteau, on voit très bien qu'il a un pansement au pouce gauche (28e). Après s'être écroulé, quand il tend sa main gauche vers MacKenna, il n'a plus de pansement.
9 MacKenna se rend chez Ambrose Chappell (58e). Lorsqu'il entre dans la rue, le trottoir est complétement dans l'ombre. Juste après quand il est suivi, il est en plein soleil.
10 Sueurs froides (1958) : Scottie et Gavin discutent autour d'un verre (37e). Les glaçons que l'on voit parfaitement sur un plan ont disparu sur le plan suivant.
11 La Mort aux trousses (1959) : 2 erreurs pour le prix d'une sur ce plan que l'on peut voir au début du film, lorsque Roger arrive au Plazza (4e). On peut remarquer tout d'abord que lorsque son taxi arrive, un autre taxi de couleur rouge se trouve derrière lui et le trottoir est désert. Lorsqu'il sort, le taxi derrière n'est plus le même (il est vert et crème) et le trottoir est rempli de passants.
12 Toujours dans La Mort aux trousses , lorsque Townsend se fait assassiner (36e), Roger prend le couteau en tenant la lame vers le bas. Sur le plan suivant, il le tient différemment, la lame est orientée vers le haut.
13 Psychose (1960) : le détective Arbogast se fait assassiner en haut des escaliers (77e). Lorsqu'il descend les marches en reculant, sa veste est fermée. Quand il s'écroule en bas, elle est grande ouverte.
14 Les Oiseaux (1963) : Mélanie est dans le canot lorsqu'elle se fait attaquer par une mouette (24e). Elle pose sa main droite à plat sur son crâne à l'endroit où elle est blessée mais sur son gant, on voit que le sang se trouve au bout de son index et non au milieu du gant.
15 Toujours dans Les Oiseaux, une mouette vient s'écraser contre la porte d'Annie (45e). Lorsqu'elle ouvre la porte, on voit une maison avec 2 fenêtres allumées en arrière plan, juste après cette maison a disparu.
16 Pas de printemps pour Marnie (1964) : Marnie et Mark sont assis à une table au champ de courses (35e). Ils ont chacun un verre posé devant eux. Sur le plan suivant, lorsqu'ils se lèvent, il n'y a plus de verre.
17 Toujours dans Pas de printemps pour Marnie, Mark plonge dans la piscine en peignoir pour sauver Marnie (76e). Son peignoir est trempé quand il remonte. On voit furtivement, lorsqu'il soigne Marnie que seul le haut du peignoir est mouillé.
18 L'Étau (1969) : Nordstrom donne l'enveloppe contenant l'argent à Devereaux (32e). Celui-ci la met dans la poche intérieure gauche de sa veste. Lorsqu'il la sort pour la donner au fleuriste espion (34'), elle est dans la poche droite.
19 Frenzy (1972) : Le cadavre tombe du camion (81e). Il n'a pas la même position quand la voiture de police qui suit s'arrête devant lui.
Cette liste est bien sûr loin d'être complète, à titre d'exemple, j'ai dénombré une quarantaine d'erreurs dans La Mort aux trousses, il y en a notamment de nombreuses dans l'attaque de l'avion, et il est fort possible que certaines m'aient échappé.
Désormais lorsque vous regarderez un film d'Hitchcock, ouvrez bien les yeux, il en reste de nombreuses à découvrir.
Cameos et gaffes des films d'Alfred Hitchcock.